Pourquoi j’enseigne

J’enseigne, car j’aime cette danse. Elle m’a toujours fascinée par son apparente simplicité, si complexe à maîtriser. Sa fragile beauté ne survit pas à la simplification.

J’enseigne pour que la danse apparaisse dans d’autres corps que le mien.

Enseigner, ce n’est pas remplir un vase, c’est allumer un feu.

Montaigne

Depuis le départ de Malkovsky à Callian en 1972, je creuse le même sillon, avec les outils acquis au studio et ceux issus de mes expériences grâce à mes pas de côté.

J’enseigne pour le plaisir que procure la découverte des chemins intimes qui forgent l’expression de chacun. En comprenant les ressorts mis en jeu en soi, je peux les faire découvrir à l’autre.

Pendant dix ans, j’ai voulu affiner l’écoute musicale des stagiaires. Avec Alexandre au piano, nous avons proposé des modulations rythmiques, métriques, tonales, un répertoire plus moderne, pour mettre en évidence les liens spatio-temporels.

Ensuite, avec les expériences du Réseau Danse à l’École, j’ai cherché à valoriser la conscience corporelle, la conscience cinesthésique des élèves.

Puis, j’ai introduit des temps de créativité et des passages au sol en jouant avec la gravité pour une plus grande diversité d’action. Les nouveautés proposées avaient toujours un ancrage dans un élément du style, mais je les détournais par un changement d’orientation ou de dynamique.

Ce n’est qu’avec des volontaires du groupe Brise et Lande que nous sommes passés au stade de création à partir du vocabulaire connu et d’inventions. Nous avons exploré avec les paramètres du mouvement les variables qui émergent d’une image, d’une poésie, d’une musique ou d’un thème choisi. Cette création était présentée lors des stages d’été.

Tout ce que j’ai pu glaner dans mes pas de côté, je l’ai repensé pour enrichir le matériau qui compose la technique de Malkovsky. Les idées et les expériences appréhendées sont devenues des outils pédagogiques pour éviter que la répétition et la copie ne soient les seuls moyens de transmission. Ce que j’appelle « technique » ne s’oppose pas à la totalité du physique, émotionnel et spirituel ou
symbolique. C’est une discipline qui permet de travailler la corporéité de chacun, car elle repose sur l’imbrication des perceptions dans l’organisation des coordinations, de l’imaginaire, associés à des mots.

C’est donc par une succession d’étapes dans mon parcours que j’ai interrogé le patrimoine pour le comprendre et le transmettre au mieux.
Dans mon enseignement j’ai toujours privilégié le comment faire. J’ai orienté mon travail vers une danse artistique, qui va au-delà du bien-être, et dont l’aboutissement pourrait se montrer sur scène.

Extrait du livre Dans les pas de Malkovsky