Décryptage du passé et incursion en Méditerranée
Il faut lui rendre justice: la 15e édition du festival Uzès Danse, pour exigeante qu’elle soit, creuse activement le sillon de la création contemporaine. Pas facile d’occuper cette place, à quelques jours du très médiatique Montpellier Danse. Aussi, sous l’intitulé très plasticien de « in sittu » (expression réservé aux actions d’artistes dans l’espace public), Eliane Shaus, sa directrice, insuffle l’idée de parler
d’intime en lien avec le patrimoine, vivant et historique.
Dès l’ouverture samedi dernier, Confidences en donne une vision légère. Il s’agit de parcourir la ville en cinq lieux et d’y assister à un solo qui en exprime le suc. Dans sa lourde et belle robe corsetée, Laurence Saboye évoque des transports pudiques dans la cour d’un hôtel particulier. En coin de rue, Laurent Pichaud embarque le spectateur dans une aventure à la Tati, versatile, attentive et humoristique.
Les confidences font le grand écart, mais amènent aussi à percevoir la ténacité de chorégraphes installés en région.
Dans le Jardin de l’Évéché le soir même, Cécilia Bengolea et François Chaignaud offrent des Danses libres. Têtes de pont d’une génération montante en danse contemporaine les deux chorégraphes, invités aussi à Montpellier, jouent les archéologues. Ils remontent des pièces de l’entredeux-guerres de François Malkovsky en compagnie de Suzanne Bodak qui a suivi son enseignement.
Jugées désuètes par beaucoup, elles exposent pourtant comment se vivait une danse naturelle et expressive, à l’ombre d’Isadora Duncan, avant l’hécatombe de 39-45. Naïf, frivole, infantile, romantique, le danseur ressemble à un papillon fragile.
Mais tel est le véritable passé européen, avant le raz de marée de la pensée américaine. De quoi construire du neuf, donc en décryptant le passé.
Lise Ott